Entre nécessité et dérives, un modèle à mieux encadrer alors que le trafic va doubler à l’horizon 2050
Le transport aérien mondial connaît une croissance spectaculaire : en 2024, 178 millions de passagers ont transité par les aéroports français, soit 17% de plus en un an. Et la demande va encore augmenter, avec une prévision de trafic mondial qui pourrait atteindre 10 milliards de passagers en 2050 (Iata). Dans ce contexte, les compagnies aériennes se tournent massivement vers l’affrètement aérien (ACMI – Aircraft, Crew, Maintenance and Insurance). Cette solution consiste à louer un avion entier, avec un équipage, pour transporter des passagers ou du fret. Autrefois utilisée uniquement en dépannage par les compagnies aériennes, elle devient aujourd’hui de plus en plus récurrente, du fait de la croissance du trafic aérien mondial.
Mais ce modèle en plein essor soulève des questions majeures, en termes d’affiliation à la législation sociale, de contrat de travail, de concurrence déloyale. Consciente des enjeux, la CRPN (Retraite des Navigants) a réuni ce matin les acteurs du secteur pour échanger et formuler des propositions concrètes en faveur d’un affrètement équitable et responsable.
Un affrètement vital, mais un modèle en question
Entre pénurie d’appareils et délais de maintenance rallongés, les compagnies aériennes n’ont d’autres choix que d’affréter des avions et leurs équipages pour assurer leur programme de vols. Une tendance qui ne cesse de s’intensifier : en 2024, au niveau mondial, l’affrètement a dépassé 920 000 heures de vol, enregistrant une hausse de près de 25 % par rapport aux 738 000 heures de 2023(1). Le phénomène est particulièrement répandu sur les vols moyen-courrier : 69% des appareils concernés sont des A320 ou des B737 (avions monocouloirs).
Au départ des aéroports français, plus de 20 000 heures de vol ont été enregistrées en 2024.
Ce modèle légal et réglementé au niveau européen connaît des dérives lorsqu’il est utilisé de façon massive et prolongée. En effet, de nouveaux acteurs de l’affrètement sont apparus, qui n’exploitent aucune ligne régulière dans leur pays d’origine et ne respectent pas les normes françaises.
A titre d’exemple, en 2024, près de 300 avions monocouloirs ont été opérés en ACMI en Europe et parmi eux, plus de 70 % étaient exploités par des compagnies qui se déclarent basées en Europe de l’Est.
Conséquences :
- En vol, des équipages recrutés hors du cadre social et réglementaire français, employés sous des statuts précaires, non affiliés aux régimes sociaux Français et donc privés des protections offertes aux navigants sous contrat français,
- Une concurrence déséquilibrée, certaines compagnies profitant de ces coûts réduits pour gagner des parts de marché au détriment des opérateurs historiques,
- Parfois, des avions très anciens en circulation, dont les normes environnementales ne correspondent plus aux attentes d’un secteur qui a entamé sa mue en matière de transition énergétique.
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(1) Données AMELIA by Regourd Aviation
Mieux encadrer l’affrètement pour éviter les dérives, une nécessité
L’affrètement est une solution précieuse mais son usage intensif et parfois abusif appelle à un encadrement renforcé. La CRPN propose plusieurs mesures concrètes pour garantir une concurrence équitable et préserver les conditions de travail et de protection sociale des navigants :
- Renforcer de façon très significative les contrôles sur l’affiliation des navigants opérant régulièrement au départ de la France,
- Responsabiliser les affréteurs en les obligeant à s’assurer que les navigants employés bénéficient de conditions sociales conformes aux standards français,
- Encadrer et réguler davantage l’activité de courtage aérien, afin d’éviter les abus liés aux statuts précaires et aux rémunérations dégradées.
« L’affrètement dans le transport aérien ne doit pas devenir le nouvel eldorado de la fraude aux régimes sociaux Français. Il est temps d’agir pour un affrètement plus responsable, afin de préserver un modèle soutenable pour l’ensemble du secteur. La CRPN en appelle aux autorités de l’État pour l’accompagner dans cette démarche », souligne Sandrine Johnson, directrice générale adjointe – CRPN.
A propos de CRPN – www.crpn.fr
La CRPN (Caisse de Retraite du Personnel Navigant de l’Aéronautique) est un organisme de retraite complémentaire obligatoire dédié aux navigants professionnels de l’aéronautique civile. Créé en 1951, il assure la gestion des droits à la retraite de plus de 50 000 affiliés, garantissant un régime spécifique adapté aux exigences et particularités du métier.
Contacts presse :
Stéphanie Kanoui – stephanie@agencethedesk.com – 06 11 66 00 50
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